Nouvelles des CHI: Unis pour la Protection des Cimetières Locaux au Mali
Par Darren P. Ashby | Responsable des programmes du patrimoine culturel d’ASOR
À la fin du mois d’août, l’AESPAT (Association des Etudiants et Sympathisants pour la Sauvegarde du Patrimoine Culturel), partenaire d’ASOR, a lancé et coordonné un effort collectif dans le village de Nafégué, situé dans la région de Sikasso au Mali, afin de nettoyer et restaurer les deux cimetières de la communauté. Nafégué est une communauté multiethnique et multiconfessionnelle. Un grand cimetière, situé au sud-ouest du village, abrite des sépultures animistes et chrétiennes, tandis qu’un autre cimetière, séparé, se trouve au nord-ouest et est utilisé par les membres musulmans de la communauté. Traditionnellement, chaque famille s’occupait de l’entretien de ses propres tombes, et il y avait peu de collaboration entre les membres de la communauté pour l’entretien des deux cimetières. En conséquence, ceux-ci étaient envahis par la végétation et de nombreuses tombes avaient été endommagées par des branches tombées ou des animaux.
Localisation de Nafégué. Crédit photo: AESPAT.
Certains membres de l’AESPAT, originaires de Nafégué, ont vu dans cette situation une opportunité de rassembler la communauté pour protéger leur patrimoine commun et mieux se connaître. Pour atteindre cet objectif, l’AESPAT a commencé par une réunion communautaire réunissant les chefs de famille des différentes communautés ethniques et religieuses du village. La discussion a porté sur les raisons de la dégradation des cimetières et sur la manière d’impliquer les habitants dans leur préservation. Une des principales conclusions de cette réunion a été que l’engagement envers l’entretien des cimetières avait diminué au fur et à mesure que la mémoire des défunts s’effaçait.
Réunion des représentants de la communauté pour examiner l’événement sur les cimetières. Crédit photo: AESPAT/ASOR.
Afin de restaurer ce sentiment de lien commun, la communauté a choisi de restaurer 13 tombes représentant la diversité du village. Pendant trois jours, les membres de la communauté, notamment les jeunes, ont nettoyé les deux cimetières et travaillé ensemble à la restauration des tombes. Dans le cadre de ce projet, l’AESPAT a également préparé de nouvelles pierres tombales portant le nom des défunts, afin que chaque individu soit honoré par les générations futures.
Un membre de la communauté musulmane restaure une tombe animiste. Crédit photo: AESPAT/ASOR.
Des membres de la communauté nettoient une tombe animiste. Crédit photo: AESPAT/ASOR.
Bien que réticents au départ, les membres de la communauté ont apprécié cette collaboration et ont commencé à réfléchir à d’autres moyens de travailler ensemble pour protéger leur patrimoine commun. Comme l’a exprimé M. Issouf Traoré, chef du village:
“Au début, j’étais quelque peu réticent à l’idée de restaurer nos tombes, car dans notre culture, il n’était pas habituel que d’autres communautés participent aux travaux funéraires de nos ancêtres ; cette tâche était réservée aux familles des défunts. Cependant, en raison de l’état de dégradation des tombes et des explications convaincantes de l’AESPAT, nous avons accepté de suivre cet exemple pratique et concret. Je suis très satisfait du résultat, surtout de la participation de toutes les communautés de mon village. Voir des chrétiens travailler sur des tombes musulmanes et animistes, et inversement, est une première dans l’histoire de Nafégué. Désormais, les noms et les tombes de nos ancêtres ne seront plus oubliés par les générations futures, alors qu’il existe plusieurs tombes anciennes dans le cimetière dont nous ignorons tout des ancêtres qui y reposent.”
Des membres de la communauté chrétienne restaurent une tombe musulmane. Crédit photo: AESPAT/ASOR.
Une tombe animiste restaurée. Crédit photo: AESPAT/ASOR.
Des initiatives comme celle-ci offrent aux communautés un moyen puissant de se rassembler autour de l’expérience partagée du deuil et de la mémoire, favorisant ainsi la connaissance mutuelle et le renforcement des relations nécessaires pour atteindre des objectifs communs.